Bilan de la présidence allemande dans les médias⚓
Le bilan de la présidence allemande au conseil de l'UE
Présentée par Lysiane Collon-Bender, Jérome Flury, Frédérique Berrod
Place de l'Europe, émission diffusée par RCF lundi 14 décembre 2020 à 19h30. Durée : 26 min ;
"Quel bilan pour la présidence allemande du Conseil de l'UE ? Les six mois de présidence tournante (entre début juillet et fin décembre) assurés par Berlin ont été marqués par de nombreux évènements au niveau européen, tels que la mise en place du Pacte vert, la gestion de la crise du coronavirus, ou encore le vote du budget européen et du plan de relance Next Generation EU. Nos chroniqueurs et nos experts font le point et analysent les perspectives pour les prochaines présidences tournantes, notamment celle assurée par la France en 2022.
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Le Figaro, Libération, La Croix
Union européenne, carton plein pour la présidence allemande
Article publié par Nicolas Baverez dans Le Figaro, dimanche 3 janvier 2021 - 18:11.
CHRONIQUE - Le bilan de la présidence allemande de l'UE lors du deuxième semestre 2020 est impressionnant, même si ses réalisations en matière de défense et d'immigration restent limitées, argumente le chroniqueur.
L'accord conclu entre l'Union européenne et la Chine le 30 décembre pour faciliter l'accès des investissements européens au marché chinois parachève le succès de la présidence allemande à la tête des Vingt-Sept. Ses enjeux étaient vitaux, au moment où l'Europe était prise sous le feu croisé de l'épidémie de Covid-19 et d'une récession historique, du Brexit et de la contestation de ses valeurs par les démocraties illibérales de l'est du continent, des coups de boutoir de Donald Trump et des menaces des démocratures. Le risque était réel que l'urgence sanitaire accapare toutes les énergies, occulte les enjeux décisifs et engendre une corona-présidence.
Le défi était donc majeur tant pour l'Allemagne, qui doit exercer seule le leadership de l'Union en raison du déclassement de la France, que pour Angela Merkel, qui, à un an de son départ du pouvoir, avait une dernière occasion de laisser sa marque dans la construction de l'Europe. Force est de constater qu'il a été superbement relevé, même si Berlin et la chancelière ne se sont pas départis de leur légendaire modestie à l'heure de dresser le bilan de leur action. Au cœur de la terrible année 2020, l'Union s'est transformée en affirmant sa solidarité à l'intérieur et sa souveraineté à l'extérieur.
Lourdement frappée et dépassée à l'origine par la crise sanitaire, l'Union s'est ressaisie. Elle n'a certes pu prévenir la seconde vague de l'épidémie ni coordonner les mesures nationales de reconfinement ou de fermeture des frontières. Mais elle a pris la direction de la négociation avec les laboratoires pharmaceutiques pour sécuriser et organiser l'approvisionnement en vaccins, retissant ainsi un lien direct avec les citoyens.
Surtout, le plan de relance de 750 milliards d'euros a été définitivement approuvé par les États comme par le Parlement, en même temps que le budget pour la période 2021 à 2027 d'un montant de 1 074 milliards d'euros. Ce plan constitue une véritable révolution par son ampleur et sa nature (360 milliards de prêts, 312 milliards de subventions, 78 milliards d'abondement des programmes d'investissement prévus au budget), par son financement via des emprunts de l'Union, par sa rapidité de mise en œuvre (70 % des versements intervenant en 2021 et 2022), par ses priorités axées sur la numérisation et la transition écologique ainsi que par la condition liée au respect de l'État de droit. Dans le même temps, la coordination entre le budget de l'Union et la politique monétaire de la BCE a été renforcée et l'accent placé sur le numérique et l'écologie accompagné par la régulation des plateformes digitales et par l'engagement de réduire de 55 % les émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2030.
La présidence allemande a simultanément réussi à conclure in extremis un accord sur le Brexit sans céder au coup de bluff du Royaume-Uni, qui avait beaucoup plus à perdre que les Vingt-Sept d'une séparation sans accord. Finalement, les intérêts économiques européens sont préservés et l'accès des entreprises britanniques au grand marché reste subordonné au respect des normes et des règles de l'Union ; auparavant, Londres avait dû renoncer à ses velléités de remettre en cause l'accord de séparation au risque de rallumer la guerre civile en Irlande du Nord. Aujourd'hui, le problème du Brexit est derrière l'Union ; il reste devant le Royaume-Uni.
Autonomie stratégique
Sur le plan mondial, la présidence allemande a engagé le repositionnement de l'Union en posant les jalons de son autonomie stratégique. Elle a su résister à l'entreprise de déstabilisation conduite par Donald Trump. En signant un accord sur la protection des investissements avec la Chine sans renoncer à la défense des droits de l'homme, elle a témoigné de sa capacité à développer une stratégie propre vis-à-vis de Pékin tout comme de sa volonté de défendre ses valeurs face au total-capitalisme chinois. Enfin, des sanctions ont été adoptées contre la Biélorussie - où de nombreux cas de tortures sont avérés sur les quelque 30.000 manifestants emprisonnés - et la Turquie qui a multiplié les coups de force en violation du droit international - de la Libye au Haut-Karabakh en passant par la Méditerranée orientale.
Le bilan de la présidence allemande est impressionnant, même si ses réalisations en matière de défense et d'immigration restent limitées. La crise sanitaire a servi de révélateur à la divergence entre les trois principales puissances européennes. Le Royaume-Uni s'est enfermé dans les mensonges du Brexit, qui se résume à beaucoup de bruit pour rien. La France a non seulement perdu le contrôle de l'épidémie, de son économie et de l'ordre public mais creusé la défiance entre les citoyens et les gouvernants. Démosthène rappelait que «les paroles qui ne sont suivies d'aucun effet sont comptées pour rien» . Espérons que 2021 amorce le redressement de la France. Pour cela, il faut que la parole publique cesse de jurer avec les faits et les mots d'Emmanuel Macron avec les choses.
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Présidence allemande de l'UE : un virage et une pluie d'hommages
Article publié par Jean Quatremer dans Libération, Vu de Bruxelles, dimanche 3 janvier 2021
Mutualisation d'une partie des dettes nationales, hausse des objectifs climatiques, accord sur le Brexit... Angela Merkel affiche un bilan inattendu, sans une ombre au tableau.
Angela Merkel, dans la dernière ligne droite de son quatrième et dernier mandat à la tête de l'Allemagne, a réussi, de façon inattendue, à inscrire son nom au panthéon de l'histoire européenne à l'instar de ses grands prédécesseurs que sont Helmut Kohl, Helmut Schmidt et Konrad Adenauer. Jusque-là, la chancelière était plutôt connue comme la «Frau Nein» de l'Europe, celle qui faisait prévaloir en toutes circonstances les intérêts allemands même si cela devait déstabiliser l'Union, de l'économie à l'immigration en passant par le nucléaire. Mais sa présidence semestrielle de l'Union, qui s'est achevée le 31 décembre, a tout changé : Merkel a fait prévaloir l'intérêt général européen, non seulement avant celui de son pays, mais aussi parfois à son encontre.
Son bilan est impressionnant : mutualisation d'une partie des dettes nationales nées de la pandémie de coronavirus via la création d'un fonds de relance de 750 milliards d'euros, adoption du cadre financier pluriannuel 2021-2027 de 1 090 milliards d'euros, objectifs climatiques revus à la hausse (réduction des gaz à effet de serre de 55 % d'ici à 2030 contre 40 % auparavant), versement des subventions européennes soumis au respect de l'Etat de droit, traité commercial avec le Royaume-Uni et, in extremis, accord d'investissement UE-Chine. «Angela Merkel s'est concentrée sur les grands dossiers politiques, ceux qui nécessitaient une décision urgente, et a délaissé le tout-venant communautaire, c'est-à-dire les questions techniques qui sont difficiles et pénibles, ou ceux qui risquaient de diviser les Européens pour un bénéfice réduit, comme le paquet migratoire», analyse un diplomate européen.
En fait, la chancelière s'est révélée avec la crise du coronavirus. Car, jusqu'en mars, l'Allemagne campait sur sa position traditionnelle depuis la fin du XXe siècle et le virage opéré par le social-démocrate Gerhard Schröder : germanique au pire, euroréticente au mieux. Emmanuel Macron, qui s'est fait élire en 2017 sur la promesse d'un renouveau européen, a d'ailleurs sans cesse buté sur le refus allemand d'aller plus avant dans l'intégration, son agitation europhile agaçant fortement Berlin.
«Admiratif»
Mais deux évènements ont tout changé : les politiques sanitaires adoptées pour lutter contre le Covid-19, qui ont fait plonger les économies européennes dans une récession sans précédent en temps de paix et l'arrêt de la Cour constitutionnelle de Karlsruhe du 5 mai, qui menaçait de déclarer inconstitutionnel les rachats de dettes publiques mis en œuvre depuis 2012 par la Banque centrale européenne pour soutenir une zone euro secouée par de multiples crises.
A ce moment-là, Merkel a pris conscience que la monnaie unique risquait d'exploser en plein vol sans un soutien budgétaire européen massif passant par un endettement commun destiné à prendre le relais de la politique monétaire afin de satisfaire ses juges constitutionnels. Or l'Allemagne souffrirait de la disparition de l'euro. Alors que jusque-là Merkel affirmait qu'il faudrait lui «passer sur le corps» pour créer une dette européenne, le 13 mai, elle annonçait qu'elle se ralliait à la proposition française d'un fonds de relance de 500 milliards d'euros alimenté par une dette commune.
«Son virage est prodigieux, je suis très admiratif», s'extasie Jean-Louis Bourlanges, le vice-président de la commission des affaires européennes de l'Assemblée nationale. «Pour la première fois, la chancelière a agi en anticipant au lieu d'attendre la dernière minute au prix, comme en Grèce, de souffrances qui auraient pu être évitées», note un haut fonctionnaire européen.
Opportunité
«La chancelière a su passer d'une présidence semestrielle normale qui l'inspirait peu à la gestion de l'état d'urgence européen. Et là, elle a excellé», reconnaît une source européenne. «L'effet présidence a aussi joué : la chancelière ne serait peut-être pas comportée comme elle l'a fait si elle ne l'avait pas eu. En outre, cela lui a permis de vendre en Allemagne des compromis, sur le fonds de relance ou sur le climat, qui auraient eu du mal à passer en temps normal», analyse Clément Beaune, secrétaire d'Etat aux Affaires européennes.
Merkel a joué sa partition en consultant non-stop sa coalition et ses ministres et en usant de sa bonne relation avec le chef de l'Etat français et de son influence au sein de sa famille politique européenne (Parti populaire européen), mais aussi en bonne entente avec Charles Michel, le président du Conseil européen, et Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission.
Ainsi, son entregent a fait merveille pour venir à bout des réticences du «club des radins» (Autriche, Danemark, Pays-Bas, Suède) qui menaçait de poser son veto au fonds de relance, puis de la Hongrie et de la Pologne qui ne voulaient pas entendre parler de la conditionnalité «Etat de droit».
De même, sur le Brexit, qu'elle ne gérait pas en direct, la répartition des rôles entre Paris (le bad cop) et Berlin (le good cop) a fonctionné pour arracher un accord à la dernière minute. Merkel a aussi saisi la fenêtre d'opportunité de l'interrègne américain pour engranger un accord d'investissement avec la Chine dès que Pékin a fait de très timides concessions en matière de travail forcé : «Tout le système allemand s'est mis en marche pour qu'on conclue avant le 31 décembre», reconnaît une source européenne. Un sans-faute de bout en bout.
Jean Quatremer correspondant à Bruxelles (UE)
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Union Européenne, le carton quasi-plein de la présidence allemande
Ce jeudi 31 décembre marque le dernier jour de la présidence allemande du Conseil de l'Union européenne. Malgré la pandémie, le pays a enregistré de nombreux succès grâce au poids politique et diplomatique de la chancelière Angela Merkel.
Article publié par Delphine Nerbollier dans La Croix, le 31/12/2020 à 13:17 Modifié le 31/12/2020 à 13:18
Berlin a quasiment réalisé un carton plein. Après six mois de présidence européenne, la plupart de ses objectifs ont été atteints. Un exploit, alors que la pandémie a rebattu l'ensemble de l'agenda politique.
« Les attentes initiales étaient hautes au regard des différentes crises et défis que représentaient le Brexit, la migration, la question du droit, le changement climatique et les négociations sur le budget », rappelle Tanja Börzel de l'Université libre de Berlin. « Or à cela se sont ajoutés de manière inattendue la pandémie et ses effets sur l'économie », commente-t-elle.
→ LIRE AUSSI. Présidence de l'UE : un moment clé pour Merkel, l'Allemagne et l'Europe
Dans ce contexte de crise, la présidence allemande a enregistré son plus grand succès avec l'accord obtenu, aux forceps, en juillet, sur un cadre budgétaire pluriannuel et sur un fonds de relance européen de 750 milliards d'euros.
Le poids politique et diplomatique de la chancelière
Pour la première fois de son histoire, l'Union européenne (UE) ouvre la voie à un début de dette commune. « Cet accord historique a pu être obtenu grâce au poids politique et diplomatique de la chancelière Angela Merkel, qui a aussi permis d'empêcher un veto de dernière minute de la Pologne et de la Hongrie », juge la chercheuse Tanja Börzel.
Cette opinion est largement partagée, outre-Rhin, notamment dans les milieux économiques. « L'Allemagne, en tant que pays expérimenté, était au bon poste au bon moment », résume Wolfgang Grosse Entrup, président de la Fédération de l'industrie chimique.
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Autre succès, le renforcement des objectifs climatiques globaux. Au lieu des 40 % de réduction de gaz à effets de serre visés d'ici à 2030 par rapport à 1990, l'UE se fixe comme objectif une baisse de 55 %. S'ajoutent deux accords commerciaux de dernière minute : celui obtenu, dans la douleur, avec le Royaume-Uni - qui a toutefois plus à voir avec le travail de la Commission qu'avec la présidence allemande - et celui, arraché cette semaine, avec la Chine, après sept années de négociations.
→ ANALYSE.L'accord sur les investissements entre la Chine et l'Union européenne est-il équilibré ?
La politologue Tanja Börzel se demande toutefois si l'accord sur les investissements avec Pékin « mènera à plus d'autonomie stratégique pour l'UE ». « En tout cas, il ne constitue pas une stratégie sur la manière dont l'UE traitera son concurrent systémique qu'est la Chine », juge-t-elle en regrettant plus largement l'absence « d'impulsion nouvelle » de la part de l'UE en ce qui concerne son rôle global dans le monde.
Pas d'avancées concrètes en politique étrangère et sur les migrations
Seules manquent en effet au tableau de chasse de l'Allemagne des avancées concrètes en matière de politique étrangère et de migration. Si des sanctions ont été approuvées contre la Biélorussie, l'objectif de résoudre le conflit gazier entre la Turquie et la Grèce n'a pas été atteint.
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Sur la question de la politique d'asile aussi, l'échec est flagrant : aucun compromis n'a pu être arraché sur une répartition des demandeurs d'asile au sein de l'UE. « En cette année marquée par l'incendie du camp de réfugiés de Moria, c'est très douloureux », regrette Peter Neher, président de l'association catholique Caritas.
Angela Merkel elle-même reconnaît les limites de sa présidence. « Beaucoup de choses n'ont pas pu être réalisées et c'est dommage », a-t-elle admis. À dix mois de son retrait de la chancellerie, elle a toutefois réussi son pari : maintenir l'UE unie et solidaire. Qui l'eût cru, il y a encore six mois ?
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DeutscheWelle
UE: résultats mitigés de la "présidence Corona" allemande
Article publié par Bernd Riegert dans DeutscheWelle le 30/12/2020. Traduit de l'allemand.
Le budget, le fonds corona et l'objectif climatique sont du côté du crédit. Au débit reste toute une liste de problèmes reportés après six mois sous la présidence allemande. Bernd Riegert de Bruxelles.
Image. Présidence allemande du Conseil de l'UE Oh, Europe: la chancelière Merkel est "soulagée" de passer la présidence au Portugal
"Une pierre est tombée de mon cœur", a déclaré mi-décembre la chancelière épuisée après une soirée négociée lors du dernier sommet de la présidence allemande du Conseil de l'UE. Angela Merkel a été soulagée que le budget de l'UE, le fonds de développement Corona comprenant un mécanisme de révision de l'état de droit des membres de l'UE soient apparus après des semaines de tremblement. Elle avait jeté tout son poids politique, son expérience de chef de gouvernement le plus ancien et l'importance économique de l'Allemagne dans la balance afin de persuader la Pologne et la Hongrie de renoncer à leur veto.
Faire passer le plus gros budget de l'histoire avec un tout nouveau fonds corona - un total de 1,8 billion d'euros - est le chef-d'œuvre de la présidence allemande à la tête du Conseil des ministres de l'UE. Si la chancelière n'avait pas réussi à faire cela, "alors l'UE serait dans une crise grave", estime Daniela Schwarzer de la Société allemande de politique étrangère (DGAP). "Créer le fonds de développement Corona était important. Le fait que des subventions non remboursables soient effectivement distribuées aux États montre la profondeur de la crise", a déclaré Daniela Schwarzer dans un "webinaire" de la DGAP à la fin de la présidence du Conseil.
Image. Belgique Bruxelles I Sommet de l'UE I Charles Michel I Ursula von der Leyen Sommet permanent sous le soleil de juillet à Bruxelles: paquet budgétaire historique contre Corona
Paquet financier historique
En juillet, juste au début de la présidence de six mois, les 27 chefs d'État et de gouvernement ont rassemblé le paquet financier lors d'un sommet marathon de quatre jours et quatre nuits. L'ambassadeur allemand à l'UE Michael Clauss admet rétrospectivement que le sommet était au bord de l'échec à plusieurs reprises. Mais le chancelier fédéral et président du Conseil de l'UE, Charles Michel, ont constamment réussi à rassembler tous les intérêts sous un même toit. Des mois plus tard, la Pologne et la Hongrie ont de nouveau opposé leur veto parce qu'elles n'aimaient pas la conception des contrôles de l'état de droit. Les deux États ont longtemps été critiqués par la Commission européenne et la Cour européenne de justice pour avoir porté atteinte à leur état constitutionnel. Ce n'est qu'après que les 25 autres pays de l'UE ont accepté une prorogation de délai et une légère restriction du mécanisme de l'état de droit que la Pologne et la Hongrie ont cédé.
Cette façon de traiter les uns avec les autres en dit long sur l'état interne de l'UE, déclare Daniela Schwarzer de la Société allemande de politique étrangère. "Les institutions de l'UE ont été instrumentalisées par deux États à des fins politiques nationales." Il y avait bien sûr d'énormes pressions pour établir le budget si nécessaire maintenant, mais à moyen terme, il se pourrait que le mécanisme de l'État de droit ne fonctionne pas et soit plus dommageable que bénéfique, prévient Daniela Schwarzer.
Image. L'UE se bat pour le paquet financier I M. Morawiecki et V. Orban Adversaires: le Premier ministre hongrois Orban (à gauche) et le Premier ministre polonais Morawiecki se sont affrontés à plusieurs reprises
Dettes communes pour la première fois
Pour la première fois, les pays de l'UE s'endettent ensemble des centaines de milliards d'euros pour amortir les effets de la pandémie. Ce tournant historique va-t-il rapprocher l'UE? "L'histoire montrera si tel est le cas", déclare l'ambassadeur allemand à l'UE Michael Clauss. "J'ai des doutes à ce sujet. Mais vous pouvez dire que l'UE a grandi pour relever ses défis. Le ministre allemand des Affaires étrangères Heiko Maas avait baptisé la présidence du Conseil la" présidence Corona "parce que la pandémie précisait les sujets et, surtout, les projets de politique étrangère ne le faisaient pas. «Nous n'avions que 30% de notre capacité de réunion normale», se plaint l'ambassadeur Clauss, ajoutant que nous devions nous limiter à quelques points essentiels.
Image. Sommet UE-Chine sur la protection des marques. La diplomatie vidéo à ses limites: juste un mini-sommet avec le président chinois Xi en septembre
Un compromis climatique réussi
Un succès pour la présidence allemande est l'accord de dernière minute sur un nouvel objectif de protection du climat pour l'UE. D'ici 2030, les émissions nuisibles au climat doivent être réduites de 55% au lieu des 40% précédents. La Pologne et d'autres pays dépendants des énergies fossiles ont été pratiquement rachetés de cet accord avec des subventions pour la transition énergétique au cours d'une longue nuit de négociations.
"C'est une heureuse coïncidence historique que l'Allemagne ait présidé le Conseil pendant la pandémie", a déclaré le responsable du groupe de réflexion "European Policy Center", Janis Emmanouilidis à Bruxelles.
L'observateur de longue date de l'UE estime que les petits États membres de l'UE auraient difficilement pu négocier ces compromis. Surtout, la chancelière Merkel aurait fait du bon travail en tant que médiateur. "Elle nous manquera toujours", déclare Janis Emmaouilidis en vue du mandat de Merkel, qui expirera en 2021. Dans l'ensemble, il a donné à cette 13e présidence allemande depuis la fondation de l'UE une note de deux plus. "Cela ne pouvait pas être un problème à cause des nombreux échecs causés par la pandémie."
Longue liste de travaux inachevés
La chancelière Angela Merkel a également admis que beaucoup de choses n'avaient pas fonctionné. "Nous avions prévu un peu plus ici. Je tiens à le dire très franchement ici", a déclaré Merkel lors de sa conférence de presse après le sommet de l'UE. Les relations avec la Turquie ne peuvent pas être améliorées. L'UE va désormais imposer au moins de légères sanctions dans le différend sur l'exploration gazière en Méditerranée orientale. Le début des négociations d'adhésion avec la Macédoine du Nord et l'Albanie a échoué en raison du veto de la Bulgarie. Les sommets prévus avec la Chine et l'Union africaine ont dû être annulés. Une "conférence sur l'avenir de l'UE" censée pousser les réformes n'a pas pu démarrer. Le fer de lance de la législation sur la migration et l'asile sera transmis à la prochaine présidence portugaise. Ici aussi, ce sont principalement la Hongrie et la Pologne qui bloquent.
Regarder la vidéo 02:27 Kastellorizo: au milieu de la zone de conflit gréco-turque
La liste des travaux inachevés pourrait continuer. Mais on ne peut pas tout reprocher à la présidence allemande ou à une quelconque présidence du Conseil, déclare l'ambassadeur allemand à l'UE Clauss. Cela serait simplement dû à la structure complexe et à la vision diamétralement différente de beaucoup de choses dans les États membres. Clauss cite la tentative de s'accorder sur des mesures de corona uniformes comme exemple. La quarantaine est de 14 jours dans certains États, de dix, sept ou cinq jours dans d'autres. En Suède, il n'y en aurait pas du tout. Une détermination conjointe n'était pas possible.
"Je souhaiterais voir davantage de décisions à la majorité qualifiée", a déclaré l'ambassadeur Clauss après six mois passés sur la sellette du président. La nécessité de l'unanimité dans de nombreux domaines paralyserait le processus décisionnel. Depuis le conseil pour tous ses successeurs: "Attendez-vous à l'inattendu".
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Fondation Jean Jaurès
Le bilan de la présidence allemande du Conseil européen
Article publié par Ernst Stetter sur le site de la Fondation Jean Jaurès le 04/01/2021 Lecture 5'
La présidence allemande du Conseil européen s'est achevée le 31 décembre 2020. Comment juger la performance de Berlin au terme de ces six mois marqués par la crise liée au coronavirus, la dégradation de la situation économique et les difficiles négociations entre les vingt-sept pour tenter d'y apporter une réponse commune ? Ernst Stetter, conseiller spécial du président de la Fondation Jean-Jaurès pour l'Europe, analyse le bilan de la dernière présidence allemande de l'ère Merkel.
« Beaucoup des choses n'ont pas pu être mises en œuvre, et c'est dommage ». C'est par cette formule plus que typique de la chancelière allemande qu'Angela Merkel a choisi de résumer la présidence allemande du Conseil européen.
De fait, l'Allemagne s'était préparée depuis longtemps pour cette présidence du Conseil européen, pour laquelle elle avait planifié de nombreux thèmes de travail et projets de réformes. Mais la pandémie est venue perturber ce programme, et la présidence allemande de l'Union européenne (UE) au deuxième semestre 2020 a donc dû pivoter vers la lutte contre le coronavirus et la négociation de mesures d'urgence pour tenter de limiter autant que possible les conséquences sanitaires, économiques et sociales de la crise pour les citoyens européens.
Pour mesurer le chemin parcouru, il faut rappeler la situation qui était celle de l'UE au moment où la première vague du coronavirus s'abattait sur elle au cours du premier semestre 2020. Dans des discours presque quotidiens, la présidente de la Commission plaidait sans succès pour que les États membres s'entendent sur une approche commune contre le virus. Les frontières se fermaient sans aucune concertation au sein de l'espace Schengen, la solidarité européenne s'effaçait derrière les urgences nationales, et le refus de la France ou de l'Allemagne d'exporter le peu de masques à leur disposition obligeait les nations les plus touchées, l'Italie et l'Espagne, à jouer le jeu de la propagande anti-européenne en se tournant vers la Russie et la Chine pour les fournir en blouses médicales et en masques de protection. Face à l'échauffement des esprits, la Commission apparaissait impuissante. Dans les milieux économiques, on craignait une dévastation économique européenne et mondiale, tandis que les bourses connaissaient un effondrement comparable à celui de la crise financière de 2007-2008. Certains pays vivaient sous la menace d'une hémorragie économique à court terme, tandis qu'à moyen terme on voyait se dessiner à l'horizon la menace d'une rupture de la zone euro, voire de l'UE.
I - La Covid-19 et le tabou brisé de la dette commune
C'est précisément à ce moment que l'Allemagne a pris la présidence de l'UE et aidé à stabiliser la situation. Des programmes de sauvetage dotés de sommes astronomiques ont été déclenchés au niveau européen et, de façon encore plus notable, un tabou longtemps considéré par les Allemands comme totalement inviolable a été brisé : un emprunt conjoint européen assorti d'une clause de solidarité entre les États membres. Alors que l'Allemagne s'y refusait depuis des années, la chancelière Angela Merkel et son ministre des Finances Olaf Scholz ont réussi en très peu de temps à convaincre leur partis et leurs groupes parlementaires de la CDU/CSU et du SPD à accepter l'idée d'un endettement commun à l'ensemble de l'UE.
C'est sans doute là le succès le plus marquant, pour ne pas dire historique, de la présidence allemande. Il est d'autant plus important que le cadre financier pluriannuel et l'instrument de reconstruction (« Next Generation EU ») autorisent désormais pour la première fois l'UE à emprunter collectivement de l'argent sur les marchés financiers et à redistribuer ces fonds sous la forme de prêts et, surtout, de subventions qui n'auront pas à être remboursées. Avant le coronavirus, un tel mécanisme n'aurait pas été possible : il n'aurait pas été approuvé par l'Allemagne, et le gouvernement britannique s'y serait également opposé s'il avait encore été présent à la table des négociations européennes.
L'UE semble avoir tiré les leçons de ses erreurs passées. Alors que, pendant la crise financière de 2007-2008, les gouvernements allemand et français avaient adopté une attitude moralisatrice et puni la Grèce pour « ses erreurs » de gestion, l'UE a cette fois-ci fait le choix de la solidarité en mobilisant 750 milliards d'euros d'aides à très court terme. Le mérite de ce succès revient à l'entente franco-allemande retrouvée et au soutien qu'a su apporter Emmanuel Macron à l'action d'Angela Merkel et de son ministre des Finances Olaf Scholz. Cette entente historique a été décidée au sommet de juillet 2020, au cours duquel le gouvernement fédéral d'Allemagne a sauté par-dessus son ombre politique.
Le budget reste l'instrument politique le plus important de l'UE. C'est lui qui assure le fonctionnement de multiples programmes financiers qui, à l'image des fonds structurels, sont souvent indispensables pour le bon fonctionnement de certains pays européens. Que l'UE s'entende sur un budget de plus de 1000 milliards d'euros et sur ces 750 milliards d'euros de prêts n'est donc pas une mince affaire. Toutefois, le budget demande en même temps au moins une certaine discipline économique pour garantir l'accès au marché européen qui promet croissance et meilleur bien-être pour les citoyens, et donc assure souvent pas moins que le pouvoir politique.
Le mérite en revient en grande partie à la présidence allemande et à la diplomatie qu'elle a su déployer face aux quatre pays frugaux. L'affaire aurait été autrement plus compliquée à faire aboutir si un pays moins important s'était trouvé à la présidence de l'UE.
II - L'Union des valeurs contre l'Union des avantages économiques
Mais le travail est encore loin d'être achevé, et l'UE devrait par la suite s'atteler à la difficile tâche de négocier les détails de l'accord afin de répondre à plusieurs exigences qui sont parfois contradictoires : faire en sorte que les 1800 milliards d'euros d'aide relancent rapidement l'économie tout en répondant aux exigences de la protection environnementale et au défi de la numérisation.
Le Conseil européen s'est très vite entendu sur le principe général d'une réduction d'au moins 55 % des émissions de CO2 d'ici 2030 par rapport à leur niveau de 1990, mais le climat n'a pas été suffisamment pris en compte par les dirigeants européens qui ont préféré se concentrer sur la relance économique. Il revient désormais à la présidence portugaise d'en faire une véritable priorité.
Lier le plan de relance aux questions économiques était moins difficile que soumettre la distribution de ces fonds également au respect de l'État de droit et des valeurs européennes, un point qui a failli faire échouer le plan de sauvetage de l'UE. En effet, on a encore une fois pu constater que, aux yeux de certains pays européens, l'argent des subventions européennes revêt une bien plus grande importance que les valeurs censées les accompagner. La présidence allemande a donc été contrainte d'accepter la cruelle réalité : en dépit des efforts de plusieurs pays pour en faire un espace politique et solidaire, l'UE reste en premier lieu une communauté économique et financière au sein de laquelle les intérêts nationaux conservent la priorité.
Malgré la réussite des innovations budgétaires qu'elle a su négocier et les montants exorbitants des prêts auxquels elle a consenti, la présidence allemande aurait été considérée comme un échec politique si elle avait été privée du soutien de la Hongrie et de la Pologne sur le budget européen. En menaçant de rejeter le budget européen et de paralyser l'ensemble du plan de relance des vingt-sept, ces deux pays ont habilement tourné à leur avantage la règle de l'unanimité européenne pour obtenir que Bruxelles ne conditionne pas ses aides au respect de l'État de droit.
Le premier ministre hongrois Viktor Orbàn s'est particulièrement illustré à cette occasion avec un calcul tout à fait diabolique. Dans une interview publiée dans le prestigieux hebdomadaire allemand Die Zeit quelques jours avant le conseil européen de décembre, celui-ci a expliqué sans aucune gêne le fond de sa pensée : « Les pays dans le besoin veulent l'argent vite. Donnons-leur cet argent. Les autres pays veulent de nouvelles règles d'État de droit. Très bien, discutons-en. La première chose, nous devons nous y mettre tout de suite. La seconde est moins urgente et peut attendre quelques mois ».
S'ils brillent par leur cynisme, ces propos ont au moins le mérite d'illustrer les divisions qui caractérisent les vingt-sept, entre d'un côté ceux qui souhaitent approfondir la construction européenne pour en faire un espace politique intégré capable de fournir un contre-modèle à l'autoritarisme chinois ou russe, et ceux qui se contentent d'une structure économique à même de leur apporter des avantages économiques et financiers.
Lorsque les traités fondateurs européens ont été signés à Rome en 1957, une union européenne des valeurs n'était pas à l'ordre du jour. Ce n'est qu'au fur et à mesure, principalement sur la base de la jurisprudence de la Cour européenne de justice, que la Communauté économique européenne s'est transformée en une alliance invoquant les valeurs communes aujourd'hui énumérées à l'article 2 du traité de l'UE.
Lorsque l'UE s'est élargie en 2004 à de nouveaux pays de l'est et du sud de l'Europe, les traités d'adhésion engageaient donc ces derniers à respecter un certain nombre de valeurs : la démocratie, la liberté d'expression, la protection des minorités, le respect de l'État de droit et de l'indépendance de la justice devaient désormais être intégrées dans leur droit national. Cette obligation a ensuite été encore renforcée par le traité de Lisbonne de 2007, qui confère une valeur juridiquement contraignante à la charte européenne des droits fondamentaux.
C'est ce traité de Lisbonne qui constitue aujourd'hui la dernière chance de sauver des pays comme la Hongrie, la Pologne, la Roumanie ou la Slovénie des dérives autoritaires de leurs dirigeants. Cependant, les défenseurs d'une Europe éclairée pâtissent d'un désavantage : si l'article 2 du traité sur l'Union européenne affirme que cette Union est bien fondée sur les valeurs de l'État de droit, l'absence d'instruments juridiques pour sanctionner d'éventuels reculs démocratiques crée un flou qui profite aux partisans de l'illibéralisme. Il leur est d'autant plus facile de se soustraire aux sanctions que la notion d'État de droit diffère d'un pays à l'autre de l'UE et est soumise à un vaste champ d'interprétation : l'État de droit français ne recouvre pas le même spectre que le « Rechtsstaat » allemand. En plus d'être politique et éthique, il existe donc une vraie difficulté juridique à définir d'une manière uniforme les règles et principes d'un État de droit européen.
La séquence politique actuelle découle de ce flou. Il explique la difficulté des négociations autour de la conditionnalité des aides européennes, mais pas seulement. En effet, la perspective de voir les aides européennes réduites de façon substantielle constituait une menace directe pour la survie politique des gouvernements hongrois et polonais. Ce sont en effet ces aides qui permettent au PiS polonais et au gouvernement de Viktor Orbàn de financer leur politique clientéliste dans les zones rurales. Au-delà de l'utilité économique de ces aides et de leur exploitation politique, leur suspension enverrait le message que ces deux pays ne sont pas des États de droit mais des régimes autoritaires potentiellement instables, ce qui pourrait dissuader certains investisseurs étrangers de maintenir ou d'accroître leur présence sur place. Les conséquences économiques pourraient être dramatiques.
Pour ces pays, la question de la non-conditionnalité des aides était donc cruciale. Alors que l'Europe sort généralement de ses blocages par la négociation et le compromis, leur obstructionnisme n'a pu être contourné qu'en utilisant la méthode de la carotte et du bâton. Même la chancelière Merkel, pourtant au pouvoir depuis 2005 et parfaitement rodée aux négociations européennes, ne semblait pas trouver de solution adéquate, et le compromis qui a été négocié, s'il permet de gagner du temps et d'assurer le bon fonctionnement de l'UE à court terme en temps de crise, s'est fait sur la base du plus petit dénominateur commun.
Angela Merkel aurait incontestablement pu adopter une position plus dure face à Viktor Orbàn, mais elle a sans surprise préféré s'en tenir à sa méthode habituelle basée sur le pragmatisme : l'unité et le bon fonctionnement des institutions priment sur le reste.
III - L'Union européenne reste une Union à réformer
Malgré l'importance des désaccords initiaux, la compétence diplomatique de la présidence allemande a permis de parvenir à un accord. En parvenant à rassembler et à faire avancer les vingt-sept, l'Allemagne, sa chancelière et son gouvernement ont montré qu'un grand pays de l'UE pouvait réussir là où les institutions européennes échouent encore trop souvent. Ce dernier semestre 2020 a montré que l'UE pouvait s'améliorer, mais les difficultés observées nous rappellent encore une fois que la règle de l'unanimité imposée par les traités européens peut être un frein au progrès.
Si l'UE ne brille pas en ce début d'année 2021, elle a au moins su limiter les dégâts considérables qu'on pouvait redouter de la crise sanitaire et économique historique que le monde traverse. De ce point de vue, la présidence allemande de l'UE doit être considérée comme un succès. Le pragmatisme d'Angela Merkel a su permettre à l'UE de se donner les moyens de faire face à la pire crise de son histoire. Alors qu'elle s'apprête à passer la main, il faut y voir son testament politique à l'attention de l'UE. Mais ces directives suffiront-elles à l'UE pour se sortir de la deuxième et de la troisième vagues du coronavirus ? Rien n'est moins sûr.
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Présidence allemande du Conseil de l'Union européenne (UE) : Quel bilan géopolitique ?
Dans cet article Paul Maurice livre un bilan exhaustif de la présidence allemande du Conseil de l'Union européenne (UE).
Le 10 septembre 2019, la nouvelle présidente de la Commission européenne (Ursula von der Leyen) l'avait qualifiée de « géopolitique ». L'idée est d'établir un nouveau partenariat avec les puissances extérieures et des engagements sur les enjeux d'avenir. L'UE doit « être un acteur, pas un terrain de jeu ». Tous les grands sujets du moment dans ce monde déconstruit sont abordés : Brexit, Chine, Turquie, Russie, UE et Afrique etc.
Si l'Allemagne s'est engagée dans une démarche géopolitique, en rupture avec son histoire récente, elle a du mal à se dégager du primat de l'économique (« une puissance hégémonique réticente »), qui la projetterait loin de la position « confortable » d'une grande Suisse. Les premiers pas géopolitiques, européens et allemands, sont assez modestes (quasi-silence sur Hong Kong, les Ouïgours, relations avec la Russie etc.). L'illusion de la neutralité de l'économique par rapport au politique, dans un monde où les démocraties sont désormais sur la défensive, semble perdurer.
Paul Maurice est chercheur au Comité d'études des relations franco-allemandes (Cerfa) à l'Ifri.